Carnaval ambrosien
Carnaval ambrosien Carnaval de Milan | |
Départ du cortège historique Porta Venezia (it) | |
Nom officiel | Carnevale ambrosiano |
---|---|
Autre(s) nom(s) | Carnevalone |
Observé par | La ville de Milan et les territoires de tradition ambrosienne |
Type | Fête à caractère historique et religieux |
Signification | Prélude au Carême |
Commence | Mardi gras |
Finit | Dimanche des Cendres |
Date | Février - dates mobiles (premières manifestations : IVe siècle) |
Célébrations | Cortège en costumes historiques, défilé de masques et de chars allégoriques (en), bals masqués |
Observances | Rite ambrosien |
modifier |
Le Carnaval ambrosien est un événement festif annuel à caractère historique et religieux dont les manifestations se déroulent lors de la période de carnaval à Milan et dans les diocèses du Tessin observant le rite ambrosien.
Articulation du carnaval avec le rite ambrosien
Dans le rite ambrosien, observé dans la majeure partie des églises de l'archidiocèse de Milan et dans quelques diocèses voisins, notamment dans le canton du Tessin[1],[2], la période du Carême commence le premier dimanche de carême qui devient ici le Dimanche des Cendres, équivalent ambrosien du Mercredi des Cendres du rite romain. Le Carnaval se poursuit ainsi durant quatre jours au-delà du Mardi gras, par lequel il se termine dans le rite romain, jusqu'au Samedi gras, journée conclusive du Carnaval ambrosien[3].
Selon la tradition orale, à l'origine de cet usage se trouve une requête spécifique de saint Ambroise qui, en pèlerinage loin de Milan, aurait demandé à la population d'attendre son retour afin de lui permettre d'être présent pour célébrer le début du Carême. Cette prolongation est vraisemblablement due à des raisons de guerre, de disette, d'épidémie ou à la transition entre le calendrier julien et le calendrier grégorien qui se situe en 1582. Une autre explication réside dans le décompte des jours lié à la différenciation entre les termes de pénitence et de jeûne au sens strict, le décompte ambrosien étant le décompte original du Carême primitif dans tous les rites. Des raisons mercantiles sont également prêtées au prélat, tendant à favoriser le commerce milanais par la prolongation des jours de réjouissance[3].
Tradition orale
La chronologie historique des événements replace dans le temps la succession des faits qui ont déterminé la lente définition du Carnaval ambrosien et plus largement celle du carnaval moderne. Du point de vue religieux, une grande partie des sources ramène à la transcription de traditions orales, improprement nommées légendes. Des variantes des récits oraux désormais codifiés proposent des personnages existants dans des lieux réels participant d'avènements historiquement prouvés.
Première tradition orale
Dans la seconde moitié du IVe siècle, le Carnaval de Milan est renommé pour ses festivités grandioses et pour son faste. Les milanais attendent le retour de l'évêque Ambroise pour la liturgie du Carême. Le retard du haut-prélat justifie de manière inappropriée le prolongement du divertissement jusqu'à son arrivée. La variante propose une demande d'Ambroise à la cité de différer la fin du Carnaval jusqu'à son retour.
Deuxième tradition orale
Ambroise est en voyage diplomatique dans les provinces de l'Empire gouverné par Théodose, vraisemblablement un pèlerinage en Terre sainte sur les traces de l'impératrice Hélène ou une ambassade à Trèves Préfecture du prétoire des Gaules. Personne n'ose fêter le Carnaval avant le retour à Milan d'un tel citoyen illustre, influent et vénéré, quand le temps du Carême est arrivé. Aussi celui-ci concède-t-il une dispense, l'habeatis grassum, pour quatre jours de divertissement en plus du temps canonique qui précède une longue période de pénitence. Une variante raconte qu'Ambroise, de retour d'un voyage à Rome, vraisemblablement lié à ses obligations auprès du Pape et de la curie romaine, est extrêmement en retard sur les festivités carnavalesques. Une délégation de notables le rencontre à mi-chemin et obtient son consentement pour dérouler les rites en son absence.
Troisième tradition orale
Les sources documentaires remontant au XVIe siècle et relatives à la chronologie historique de Milan au IVe siècle évoquent l'état de la ville décimée par la peste. La population est mise en quarantaine, les voies d'accès sont fermées et limitées aux échanges commerciaux, les vivres sont rationnés. La situation est normalisée à la veille de la période de jeûne du Carême. Souffrances, faim, restrictions, sont un vrai supplice pour la population déjà épuisée par la maladie et les privations. Ambroise expose la délicate question au Pape et obtient une dispense spéciale perpétuelle : il est concédé de festoyer jusqu'au samedi précédent le premier dimanche de Carême au seul diocèse de Milan et aux territoires de son ressort. Le décompte primitif est ainsi à nouveau reconnu. La tradition ne fait pas référence à une année spécifique. Les Papes, sous le mandat épiscopal d'Ambroise, sont successivement Damase et Sirice.
Bien que ne reposant pas sur des sources écrites autorisées et reconnues, toutes les variantes observent le décompte préexistant du rite liturgique (it) consolidé dans le rite ambrosien.
Contexte historique
Empire romain d'Occident
En 306, l'empereur Constantin Ier, auteur, avec Licinius de l'édit de Milan, et sa mère Flavia Giulia Elena contribuent à la diffusion du Christianisme en Occident. Mediolanum, capitale impériale de l'Empire romain d'Occident est gouvernée par Maximien Hercule puis Théodose Ier avant le transfert de la capitale à Ravenne. En 380 Théodose promulgue, avec les deux autres César Auguste Gratien et Valentinien II, l'édit de Thessalonique, par lequel le credo de Nicée devient la religion unique et obligatoire de l'Empire[4]. Théodose qui professe le credo de Nicée par opposition à l'arianisme, convoque en 381 le premier concile de Constantinople pour condamner les hérésies qui s'opposent aux principes du concile de Nicée. Entre 391 et 392 sont pris les décrets théodosiens (it) d'application de l'édit de Tessalonique : l'accès aux temples païens est interdit, la prohibition de toute forme de culte est réaffirmée, l'adoration des statues et autres idoles païennes est prohibée[5], les sanctions administratives contre les chrétiens qui se convertissent à nouveau au paganisme sont aggravées[6]. Par le décret pris en 392 à Constantinople, l'immolation des victimes dans les sacrifices est poursuivie, la consultation des viscères est condamnée, assimilée au délit de Lex Iulia maiestatis (it) (crime de lèse-majesté) passible de la peine de mort[7]. Les temples païens sont l'objet de destructions systématiques, les biens sont confisqués, les chefs sont mis aux arrêts et les adeptes persécutés[8]. En 393, sous l'influence de l'évêque Ambroise, les jeux olympiques sont qualifiés de fête païenne et leur fermeture est décrétée. Le massacre de Thessalonique et surtout l'intolérable niveau de corruption régnant entre les athlètes et les organisateurs qui faussent les compétitions viennent renforcer cette décision qui met fin à une tradition millénaire[9].
Au moment de la transition entre la religion romaine et le christianisme on assiste à un renversement des rôles. De chrétiens persécutés à chrétiens persécuteurs, dans la figure même de l'Empereur qui, animé par des raisons politiques, sociales, psychologiques, stratégiques, frôle l'orthodoxie radicale tendant au fanatisme, débouchant sur de cruelles et sanglantes persécutions, provoquant souvent des conflits longs et animés entre Ambroise et Théodose. La religion romaine cesse donc d'être pratiquée à la fin du IVe siècle avec les édits promulgués par l'empereur romain de foi chrétienne Théodose qui interdit tous les cultes non chrétiens. Dans un tel contexte, avec Milan au centre de l'Empire, parmi les rares soupapes de sécurité subsistantes, les Saturnales, les Bacchanales, les Fornacalia, les Parentalia, les Lupercales, les Ides de Mars et tout l'ensemble des festivités romaines compris entre les mois de décembre et de mars, épurées des rituels orgiaques, des rites propitiatoires, des sacrifices d'animaux et des pratiques sexuelles, se transforme en rites carnavalesques dépouillés du culte des idoles païennes.
La pratique du travestissement est connue dès l'Égypte antique dans le culte de la déesse Isis et en Grèce à travers les Dionysies tandis qu'à Rome les Saturnales, proches de la foire foraine quoique plus prosaïques et dissolues, ont pour fil conducteur le renversement de l'ordre établi. De nouveaux usages et de nouvelles coutumes reviennent à ce renversement de l'ordre social et des hiérarchies pour laisser la place à l'inversion des classes, à la caricature des aristocrates et du clergé au moyen de la dérision, de la satire et de la critique, singeant les styles de vie à travers le sarcasme, l'ironie, la parodie, le burlesque, la débauche, orientés dans le champ politique et religieux à travers les cortèges, défilés et bals masqués. D'abondantes ripailles et de généreuses libations accompagnent les festivités, préludes à une longue période de pénitence marquée par les principes chrétiens tels que l'abstinence, le jeûne, l'expiation, la repentance ou la confession. Ainsi se fait jour le précurseur du Carnaval moderne qui trouve donc à Milan le berceau de ses origines.
Moyen Âge
Au Moyen Âge, le Carnaval ambrosien est plutôt grossier, transformé en fêtes licencieuses comme la fête de l'âne, festivités marquant le renversement ou l'inversion des rôles sociaux ; la fête des fous, divertissement emprunté au renversement de l'ordre établi où les fous sont transformés en rois et les clercs en hauts prélats par le truchement du déguisement, des chansons licencieuses et de la satire ; aucun usage, aucune convention n'échappe au ridicule, les personnages les plus haut placés de la société doivent se résigner à la raillerie ; bien que condamnée et censurée à plusieurs reprises, elle continue à provoquer le désordre par la licence et les farces obscènes, se gaussant des coutumes civiles et religieuses ; elle subsiste jusqu'au XVIe siècle ; la farce des innocents, d'origine ibérique et introduite durant la domination espagnole en Italie ; l'assimilation des enfants, qui par leur nature et leur tendresse étaient considérés comme innocents, aux idiots et aux fous inconscients incapables et irresponsables constitue la base de ces fêtes du cycle carnavalesque ; la fête des cocus ; etc.
Renaissance et période baroque
À la Renaissance, le Carnaval ambrosien devient plus raffiné. La période est caractérisée par l'usage des chars et des défilés fastueux.
Le carnaval et les Borromée
La commedia dell'arte
Thème des éditions contemporaines
- 2016 : XLI All'Incontrario - Il mondo dell'opposto e del contrario
- 2015 : XL Pela, Taglia, Trita, Cuoci
- 2014 : XXXIX Sportissimissimi.it
- 2013 : XXXVIII Barra a Dritta! Verso l'Isola del Tesoro
- 2012 : XXXVII Il Carnevale dei popoli
- 2011 : XXXVI Made in Italy
- 2010 : XXXV Milano città che trasforma e si trasforma ..... Trasformiamoci
- 2009 : XXXIV Milano città aperta all'innovazione e ai cambiamenti imposti dalla modernità
- 2008 : XXXIII Giocagiocattolo - I Giochi siamo noi!
- 2007 : XXXII Ritorno al Futurismo
-
Carnevalone di Milano - Il corso del sabato grasso (1893), Arnaldo Ferraguti, litographie d'après une photographie tirée de L'Illustrazione Italiana montrant le char défilant sur la Piazza della Scala avant sa démolition au début du XXe siècle.
-
Le Carnaval à Milan — les confetti, dessin de Frédéric Lix d'après un croquis d'Oswald Levens, Le Monde illustré, .
-
Porte étendards, Carnaval de Milan 2009.
-
Cortège historique, Carnaval de Milan 2009.
-
Cortège historique, Carnaval de Milan 2011.
-
Cortège historique, Carnaval de Milan 2011.
Notes et références
- « Les Walser dans l'histoire des Alpes : Réflexions en marge d'une lecture », Ruggero Crivelli, Le Globe, revue genevoise de géographie, tome 131, 1991, p. 63, persee.fr (lire en ligne)
- « Les festivités carnavalesques ont commencé — « Rabadan » tessinois », Radio télévision suisse, 25 février 2007 (lire en ligne)
- L'Adalgisa. Croquis milanais, Carlo Emilio Gadda, Jean-Paul Manganaro (traduction et présentation), Paris, Éditions du Seuil, 1987, 285 p, (ISBN 2-02-009763-X) (BNF 34970798) (lire des extraits en ligne)
- (la) Codex Theodosianus, 16, 1.2 (lire en ligne)
- (la) Codex Theodosianus, 16.10.10 (lire en ligne)
- (la) Codex Theodosianus, 16.7.4 (lire en ligne)
- (la) Codex Theodosianus, 16.10.12.1 (lire en ligne)
- Théodoret de Cyr, Historia Ecclesiastica, 5, 21. Le recteur grec Libanios se lamente de ces destructions dans sa prière Pro templis à l'empereur Théodose (en) (lire en ligne))
- Werner Petermandl, Ingomar Weiler, Nikephoros, Georg Olms Verlag, 1998, p. 182-3.
- (it) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en italien intitulé « Carnevale Ambrosiano » (voir la liste des auteurs).
Bibliographie
- (it) Il Carnevalone di Milano, Ferdinando Fumagalli, Milan, F. Manini, 1873, 32 p. (BNF 38725362) Notice SBN
- (it) Carnevale ambrosiano : una festa ritrovata, Italo Sordi, Paolo Zenoni, Milan, Commune de Milan, 1991, 89 p. Notice SBN
- (it) Mercanti e sacerdoti, Paolo Zenoni, Milan, Apogeo Editore, 2011, 207 p. (ISBN 978-88-503-3032-4) Notice SBN (lire des extraits en ligne)
Articles connexes
Liens externes
- « Liturgie et domination. L’abolition du dimanche de carnaval par Charles Borromée, archevêque de Milan (1576-1580) », Marie Lezowski, Siècles (revue du centre d'histoire « Espaces et Culture », 35-36 2012, 4 mars 2014 (lire en ligne)
- « Il Carnevale ambrosiano », Laura Savani, Baroque.it, 22 juin 2009 (lire en ligne)
- « El sciur Meneghino e il Carnevale Ambrosiano », La Milanesina, 11 février 2016 (lire en ligne)