La Grande Morale
Titre original |
(la) Magna Moralia |
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La Grande Morale (en grec ancien : Êthika megala, en latin : Magna Moralia) est un traité de morale attribué à Aristote.
Présentation générale
La Grande morale est, avec l’Éthique à Nicomaque, l’Éthique à Eudème et Sur les vertus et les vices, l'un des quatre ouvrages aristotéliciens consacrés à la morale et à l'éthique.
Résumé
Livre I
Aristote démontre que la morale fait partie de la politique. Il est nécessaire d'étudier la vertu de manière pratique car c'est le seul moyen de l'acquérir ; la contemplation philosophie ne suffit pas. Aristote procède à une doxographie (une étude des thèses) de Pythagore, Socrate et Platon. Il essaie de compléter leurs théories en allant au-delà de leurs écrits[1].
Aristote définit et distingue les biens. Il y a les biens précieux et honorables ; les biens louables ; les biens qui ne sont qu'en puissance ; les biens conservatifs ; les biens désirables partout et toujours ; les biens qui sont des fins ; les biens qui ne sont pas des fins. Le Stagirite veut trouver une méthode pour étudier le bien suprême, le souverain bien[1].
Le philosophe donne une définition de la vertu, qu'il considère être logée dans l'âme. Il revient sur sa conception de l'âme comme le souffle qui donne vie à l'homme. Il réitère sa division de l'âme en deux parties, l'une raisonnable, et l'autre irrationnelle, chacune ayant ses vertus propres[1].
L'auteur aborde la question de la vertu comme différente du défaut et de l'excès. Il donne des exemples pour distinguer les contraires[1].
Livre II
L'honnêteté
Aristote se propose d'étudier l'honnêteté. Il s'agit de « la qualité de l'homme qui exige moins que ne lui assureraient ses droits fondés sur la loi ». En effet, le législateur ne peut légiférer sur tout, alors il reste des angles morts au droit. Faire acte d'honnêteté, c'est de « céder de son droit dans les choses de ce genre, et ne demander que ce que le législateur aurait voulu ». L'honnête homme ne doit pas réduire tous ses droits, bien sûr, car il doit toujours bénéficier de ses droit naturel, qui sont ses véritables droits[1].
L'honnêteté est connexe de l'équité. L'équité assure la rectitude du jugement. Elle doit appliquée, comme l'honnêteté, aux cas passés sous silence par le législateur. L'homme équitable doit observer les lacunes de la législation, et, malgré ses lacunes, n'en constater pas moins « que le droit qu'il réclame est fondé »[1].
L'auteur aborde ensuite la question du bon sens. Le bon sens, comme la prudence, s'applique à l'action, aux choix que l'on prend dans la vie. Le bon sens « nous découvre le parti le meilleur et le plus avantageux, dans les actes que nous devons accomplir »[1].
Dans une digression, Aristote se demande s'il est un devoir que d'être poli avec chacun. Il soutient qu'il est une obligation absolue de l'homme juste que de rendre à chacun tout ce qui lui revient selon son mérite[1].
L'injustice et les vertus
Savoir que l'on est injuste est le propre de la prudence ; mais alors, cela signifie que l'homme qui est injuste est aussi un homme prudent, ce qui est contradictoire. L'homme injuste ne connaît le bien que d'une manière générale, mais en réalité, il ne connaît pas le bien de manière particulière, l'empêchant d'être vertueux[1].
Aristote soulève donc une question : en est-il des vertus comme des biens, c'est-à-dire qu'en avoir trop corrompt par excès ? Avoir de la justice ou de la bravoure à l'excès dans son cœur d'homme ne nous rendrait pas plus mauvais. Toutefois, la gloire vient de la vertu ; si on a trop de vertu, on a trop de gloire ; or, la gloire pervertit et corrompt les hommes[1].
La tempérance
La véritable vertu, pour le Stagirite, est le juste milieu. On peut l'appeler tempérance. Elle ne ressemble à aucune autre. La raison et les passions y sont opposées entre elles. Elle s'oppose à la brutalité, qui est le fait d'être en dehors de l'humanité[1].
Socrate niait la tempérance en tant que vertu, car, selon lui, nul n'est méchant volontairement ; or, l'intempérant fait le mal en sachant que c'est du mal. L'homme qui est sage, peut-il aussi être intempérant, lorsqu'il est confronté à des passions fortes ? En réalité, même si on sait ce qu'est le bien en général, car l'intempérant peut ne pas « savoir clairement que telles choses en particulier sont mauvaises ou nuisibles pour lui ». L'intempérant est comme un ivre[1].
L'intempérant est, au fond, comme un esclave. Il ne sait pas se maîtriser, et, dominé par les passions, est incapable d'utiliser sa raison. Aristote place l'intempérance qui abuse du plaisir plus bas encore que l'intempérance de colère[1].
Le hasard et la fortune
Aristote considère nécessaire d'aborder la question de la fortune (la chance) en ce qu'elle est liée au bonheur. Il est peut-être vrai qu'il n'y a pas de vie heureuse sans fortune, parce que la fortune dispose à sa guise de nos biens. L'étude de la fortune est embarrassante : elle ne ressemble pas à la nature, car dans la nature, une même cause produit toujours le même effet. La fortune, elle, ne fait jamais les choses de même manière. La fortune ne se confond pas avec l'intelligence ou la raison, parce qu'elle est sans régularité[1].
La fortune n'est pas ce qui dépend de nous. On ne dit pas qu'un homme juste est fortuné, car le fait qu'il agisse de manière juste est de son fait. En revanche, si quelqu'un naît dans une famille illustre, on dira qu'il est fortuné. La fortune est privée de raison[1].
Les amis
La fin du livre est dédiée à la question des amis. L'honnête homme est un homme indépendant. Être indépendant, cela signifie-t-il se passer d'amis ? Aristote rappelle que les poètes disent : « Quand le ciel vous soutient, pourquoi aurait-on besoin d'amis ? ». C'est là une erreur : aussi indépendant soit-on, on a toujours besoin d'un ami. L'ami est « un autre moi-même » ; la connaissance de soi étant si difficile, l'ami nous permet, comme un miroir, de nous voir nous-même. Aussi, l'ami permet de faire le bien, car pour faire le bien, il faut que certaines personnes en soient bénéficiaires[1].
Le Stagirite s'interroge ensuite sur le meilleur nombre d'amis. Il ne faut en avoir ni trop, ni trop peu. Ceux qui en ont trop peinent à partager leur affection avec chacun d'eux. Nous ne pouvons embrasser qu'un petit nombre, en veillant à ce que ce nombre ne soit pas trop faible non plus. Il en faut « un nombre convenable, et selon les occasions, et selon la mesure d'affection qu'on peut soi-même leur donner »[1].
Aristote remarque que l'on peut parfois avoir à se plaindre à un ami. Comment se conduire avec un ami dans une telle situation ? Il y a des liaisons où les plaintes ne sont pas possibles, à savoir celles où l'un des deux est inférieur à l'autre. Le traité est resté achevé, et l'on ignore donc la réponse de l'auteur[1].
Voir aussi
Bibliographie
- Édition
- Aristote, Les Grands livres d'éthique, Paris, Arléa, 1995, trad. Catherine Dalimier, 221 p.
- Études
- Ivan Gobry, La Philosophie pratique d'Aristote, Lyon, Presses universitaires de Lyon, , 200 p. (ISBN 978-2-7297-0521-3, lire en ligne).
- Augustin Mansion, « Autour des Éthiques attribuées à Aristote », Revue néo-scolastique de philosophie, vol. 33, no 29, , p. 80-107 (lire en ligne, consulté le ).
- Jean-François Thurot, La Morale et la Politique d'Aristote, Paris, Firmin Didot, , 500 p. (lire en ligne).
- « Aristote, « Grande Morale » », sur www.notesdumontroyal.com, (consulté le ).
Articles connexes
Liens externes
- Aristotle, Morale d'Aristote: Grande morale, et Morale à Eudème, Ladrange, (lire en ligne)