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« Mohammed Amin al-Husseini » : différence entre les versions

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En janvier [[1941]], il se réfugie en [[Troisième Reich|Allemagne]] et demande à [[Adolf Hitler]] la reconnaissance de l'indépendance des nations arabes vis-à-vis des puissances coloniales britannique et française, ainsi que celle du droit des autorités arabes palestiniennes à empêcher toute création de foyer juif<ref name="ushmm"/>.
En janvier [[1941]], il se réfugie en [[Troisième Reich|Allemagne]] et demande à [[Adolf Hitler]] la reconnaissance de l'indépendance des nations arabes vis-à-vis des puissances coloniales britannique et française, ainsi que celle du droit des autorités arabes palestiniennes à empêcher toute création de foyer juif<ref name="ushmm"/>.


Soutenant la prise du pouvoir par [[Rachid Ali al Gaylani]] en Irak, il prononce à la radio irakienne une [[fatwa]] appelant les musulmans au [[djihad]] contre le Royaume-Uni et reçoit des subsides allemands pour financer un projet de soulèvement en Palestine. Mais la victoire britannique dans la [[guerre anglo-irakienne]] le force à fuir sur le territoire de l'[[État impérial d'Iran]]. Après l'[[invasion anglo-soviétique de l'Iran]], il est évacué en [[Royaume d'Italie (1861-1946)|Italie]]. Le {{date-|27 octobre 1941-}}, il est reçu par [[Benito Mussolini]], qui accepte le principe d'un soutien de l'Axe à sa proposition. Il se rend ensuite en Allemagne, où il est reçu par Hitler le {{date-|28 novembre 1941}}<ref name="ushmm"/>. Des photos inédites datées du 2 novembre 1943 et rendues publiques le 15 juin 2017, le montrent en compagnie de dignitaires nazis et d'officiers SS en train de visiter, apparemment, un camp en Allemagne<ref>{{Lien web|url=http://www.haaretz.com/israel-news/1.795563|titre= Never-before-seen Photos of Palestinian Mufti With Hitler Ties Visiting Nazi Germany|site=[Haaretz|date= 15 juin 2017}}</ref>.
Soutenant la prise du pouvoir par [[Rachid Ali al Gaylani]] en Irak, il prononce à la radio irakienne une [[fatwa]] appelant les musulmans au [[djihad]] contre le Royaume-Uni et reçoit des subsides allemands pour financer un projet de soulèvement en Palestine. Mais la victoire britannique dans la [[guerre anglo-irakienne]] le force à fuir sur le territoire de l'[[État impérial d'Iran]]. Après l'[[invasion anglo-soviétique de l'Iran]], il est évacué en [[Royaume d'Italie (1861-1946)|Italie]]. Le {{date-|27 octobre 1941-}}, il est reçu par [[Benito Mussolini]], qui accepte le principe d'un soutien de l'Axe à sa proposition. Il se rend ensuite en Allemagne, où il est reçu par Hitler le {{date-|28 novembre 1941}}<ref name="ushmm"/>.


Lors de sa rencontre avec Hitler et dans ses émissions de radio, Hadj Amin al-Husseini affirme que les Juifs sont les ennemis communs de l’islam et de l'Allemagne nazie<ref>[[Gérald Fleming]], ''Hitler and the Final Solution'', Berkeley, 1984, {{p.|101-105}}. Ce chapitre décrit la visite de l'ex-Mufti à Hitler, le 28 novembre 1941, et contient le protocole de leur discussion.</ref>. Les notes sur cette rencontre sont prises par [[Paul-Otto Schmidt]]. Dans son compte-rendu, Schmidt rapporte les propos de Hitler au Mufti. Hitler lui expose certains projets stratégiques, notamment celui d’atteindre la porte sud du Caucase. Schmidt note alors : « Dès que cette percée sera faite, le Führer annoncera personnellement au monde arabe que l’heure de la libération a sonné. Après quoi, le seul objectif de l’Allemagne restant dans la région se limitera à l’extermination des Juifs vivant sous la protection britannique dans les pays arabes<ref>Notes prises par Paul Otto Schmidt entre le Führer et le mufti de Jérusalem à Berlin, le 28 novembre 1941, geheime Reichssache 57 a/41, Records Dept. Foreign and Commonwealth Office Pa/2, cité par Laurens, ''L'Orient arabe, arabisme et islamisme de 1798 à 1945'', Paris, Armand Colin, 1993, {{p.|342-346}}, et par Gerald Fleming, ''Hitler et la solution finale'', Julliard, 1988, {{p.|142-143}}.</ref> ». Dans un télégramme daté du 2 novembre 1943 pour l'anniversaire de la [[Déclaration Balfour de 1926|Déclaration Balfour]], [[Heinrich Himmler]], lui offre ses {{citation|vœux chaleureux dans sa lutte continue contre les Juifs}}. Himmler ajoutant que les Juifs du monde sont un « ennemi commun » et que pour cette raison, {{citation|il suit de près la bataille des Arabes recherchant la liberté, en particulier en Palestine, contre les envahisseurs juifs}}<ref>{{Lien web|url=http://dailycaller.com/2017/03/30/nazi-ss-commander-wished-islamic-leader-success-in-fight-against-the-jewish-invaders/|titre=Nazi SS Commander Wished Islamic Leader Success In Fight ‘Against The Jewish Invaders|site= The Daily Caller|date= 30 mars 2017}}</ref>.
Lors de sa rencontre avec Hitler et dans ses émissions de radio, Hadj Amin al-Husseini affirme que les Juifs sont les ennemis communs de l’islam et de l'Allemagne nazie<ref>[[Gérald Fleming]], ''Hitler and the Final Solution'', Berkeley, 1984, {{p.|101-105}}. Ce chapitre décrit la visite de l'ex-Mufti à Hitler, le 28 novembre 1941, et contient le protocole de leur discussion.</ref>. Les notes sur cette rencontre sont prises par [[Paul-Otto Schmidt]]. Dans son compte-rendu, Schmidt rapporte les propos de Hitler au Mufti. Hitler lui expose certains projets stratégiques, notamment celui d’atteindre la porte sud du Caucase. Schmidt note alors : « Dès que cette percée sera faite, le Führer annoncera personnellement au monde arabe que l’heure de la libération a sonné. Après quoi, le seul objectif de l’Allemagne restant dans la région se limitera à l’extermination des Juifs vivant sous la protection britannique dans les pays arabes<ref>Notes prises par Paul Otto Schmidt entre le Führer et le mufti de Jérusalem à Berlin, le 28 novembre 1941, geheime Reichssache 57 a/41, Records Dept. Foreign and Commonwealth Office Pa/2, cité par Laurens, ''L'Orient arabe, arabisme et islamisme de 1798 à 1945'', Paris, Armand Colin, 1993, {{p.|342-346}}, et par Gerald Fleming, ''Hitler et la solution finale'', Julliard, 1988, {{p.|142-143}}.</ref> ». Dans un télégramme daté du 2 novembre 1943 pour l'anniversaire de la [[Déclaration Balfour de 1926|Déclaration Balfour]], [[Heinrich Himmler]], lui offre ses {{citation|vœux chaleureux dans sa lutte continue contre les Juifs}}. Himmler ajoutant que les Juifs du monde sont un « ennemi commun » et que pour cette raison, {{citation|il suit de près la bataille des Arabes recherchant la liberté, en particulier en Palestine, contre les envahisseurs juifs}}<ref>{{Lien web|url=http://dailycaller.com/2017/03/30/nazi-ss-commander-wished-islamic-leader-success-in-fight-against-the-jewish-invaders/|titre=Nazi SS Commander Wished Islamic Leader Success In Fight ‘Against The Jewish Invaders|site= The Daily Caller|date= 30 mars 2017}}</ref>.


Hitler fut impressionné par son sens de la ruse et sa prudence tactique<ref>« Au cours des discussions il s'est révélé être un fin renard ; en vue de gagner du temps pour réfléchir, il se fait traduire certaines choses non seulement en français mais aussi en arabe, et il pousse la prudence jusqu'à s'en faire écrire d'autres. Quand il parle, il soupèse chacun de ses mots. Dans l'astuce, il égale presque les Japonais », [[Hugh Trevor-Roper]], [[Gerhard Weinberg]], Norman Cameron (trad.), R. H. Stevens (trad.), ''Hitler's Table Talk 1941-1944: His Private Conversations'', Enigma Books, 2008, 609{{nb p.}} {{isbn|978-1929631667}}, {{p.|412}}.</ref>. Il dira de lui : « Le grand mufti est un homme qui en politique ne fait pas de sentiment. Cheveux blonds et yeux bleus, le visage émacié, il semble qu'il ait plus d'un ancêtre [[Race aryenne|aryen]]. Il n'est pas impossible que le meilleur sang romain soit à l'origine de sa lignée »<ref>[[Hugh Trevor-Roper]], [[Gerhard Weinberg]], Norman Cameron (trad.), R. H. Stevens (trad.), ''Hitler's Table Talk 1941-1944: His Private Conversations'', {{opcit}}, {{p.|412}}.</ref>. Il obtient le titre d'« [[aryen d'honneur]] » en 1941. Al-Husseini travaille ensuite à des émissions de radio de propagande, destinées aux mondes arabe et musulman<ref name="ushmm"/>. En {{date-|mai 1942}}, il collabore aux recrutements de musulmans des Balkans pour former la [[13e division de montagne de la Waffen SS Handschar|{{13e|division}} de montagne de la Waffen SS Handschar]]<ref>[[Léon Poliakov]], ''De Moscou à Beyrouth : essai sur la désinformation'', Paris, Calmann-Lévy, 1983 {{ISBN|2-7021-1240-4}}, {{p.|54}}.</ref>. Cependant la majorité des Arabes et des Palestiniens ne le suivront pas, selon [[Gilbert Achcar]], {{citation|Les Arabes et les Berbères qui combattirent dans les rangs des Alliés durant la Seconde Guerre mondiale sont considérablement plus nombreux que ceux qui combattirent dans les rangs des pays de l'Axe<ref>[[Gilbert Achcar]], ''Les Arabes et la Shoah'', Arles, Actes Sud, {{coll.|Sindbad}}, 2009 [http://www.monde-diplomatique.fr/2010/01/AVRAN/18727 présentation en ligne].</ref>}}. {{référence insuffisante|Ainsi, {{nombre|9000|Palestiniens}} combattirent dans les rangs de l'Armée britannique, des centaines de milliers de Maghrébins dans les troupes de la France libre et des centaines d'arabes furent déportés dans les camps nazis »<ref>[[Alain Gresh]], ''De quoi la Palestine est-elle le nom – Les Liens qui Libèrent, Floch, septembre 2010.</ref>}}{{,}}<ref>[[Gilbert Achcar]], ''The Arabs and the Holocaust: The Arab-Israeli War of Narratives'', Henry Holt and Company, 2009, p.146.</ref>. {{lien|Robert Satloff}} rappelle quant à lui que de nombreux Arabes d'Afrique du Nord aidèrent à sauver des Juifs et auraient pu mériter le titre de [[Juste parmi les nations|Juste]]<ref>{{en}} [[Robert Satloff]], ''Among the Righteous. Lost Stories from the Holocaust's Long Reach into Arab Lands'', New York, Public Affairs, 2006.</ref>.
Hitler fut impressionné par son sens de la ruse et sa prudence tactique<ref>« Au cours des discussions il s'est révélé être un fin renard ; en vue de gagner du temps pour réfléchir, il se fait traduire certaines choses non seulement en français mais aussi en arabe, et il pousse la prudence jusqu'à s'en faire écrire d'autres. Quand il parle, il soupèse chacun de ses mots. Dans l'astuce, il égale presque les Japonais », [[Hugh Trevor-Roper]], [[Gerhard Weinberg]], Norman Cameron (trad.), R. H. Stevens (trad.), ''Hitler's Table Talk 1941-1944: His Private Conversations'', Enigma Books, 2008, 609{{nb p.}} {{isbn|978-1929631667}}, {{p.|412}}.</ref>. Il dira de lui : « Le grand mufti est un homme qui en politique ne fait pas de sentiment. Cheveux blonds et yeux bleus, le visage émacié, il semble qu'il ait plus d'un ancêtre [[Race aryenne|aryen]]. Il n'est pas impossible que le meilleur sang romain soit à l'origine de sa lignée »<ref>[[Hugh Trevor-Roper]], [[Gerhard Weinberg]], Norman Cameron (trad.), R. H. Stevens (trad.), ''Hitler's Table Talk 1941-1944: His Private Conversations'', {{opcit}}, {{p.|412}}.</ref>. Il obtient le titre d'« [[aryen d'honneur]] » en 1941. Al-Husseini travaille ensuite à des émissions de radio de propagande, destinées aux mondes arabe et musulman<ref name="ushmm"/>. En {{date-|mai 1942}}, il collabore aux recrutements de musulmans des Balkans pour former la [[13e division de montagne de la Waffen SS Handschar|{{13e|division}} de montagne de la Waffen SS Handschar]]<ref>[[Léon Poliakov]], ''De Moscou à Beyrouth : essai sur la désinformation'', Paris, Calmann-Lévy, 1983 {{ISBN|2-7021-1240-4}}, {{p.|54}}.</ref>. Cependant la majorité des Arabes et des Palestiniens ne le suivront pas, selon [[Gilbert Achcar]], {{citation|Les Arabes et les Berbères qui combattirent dans les rangs des Alliés durant la Seconde Guerre mondiale sont considérablement plus nombreux que ceux qui combattirent dans les rangs des pays de l'Axe<ref>[[Gilbert Achcar]], ''Les Arabes et la Shoah'', Arles, Actes Sud, {{coll.|Sindbad}}, 2009 [http://www.monde-diplomatique.fr/2010/01/AVRAN/18727 présentation en ligne].</ref>}}. Ainsi, {{nombre|9000|Palestiniens}} combattirent dans les rangs de l'Armée britannique, des centaines de milliers de Maghrébins dans les troupes de la France libre et des centaines d'arabes furent déportés dans les camps nazis »<ref>[[Alain Gresh]], ''De quoi la Palestine est-elle le nom – Les Liens qui Libèrent, Floch, septembre 2010.</ref>{{,}}<ref>[[Gilbert Achcar]], ''The Arabs and the Holocaust: The Arab-Israeli War of Narratives'', Henry Holt and Company, 2009, p.146.</ref>. {{lien|Robert Satloff}} rappelle quant à lui que de nombreux Arabes d'Afrique du Nord aidèrent à sauver des Juifs et auraient pu mériter le titre de [[Juste parmi les nations|Juste]]<ref>{{en}} [[Robert Satloff]], ''Among the Righteous. Lost Stories from the Holocaust's Long Reach into Arab Lands'', New York, Public Affairs, 2006.</ref>.


Dans ses mémoires parues en 1968, évoquant une plainte déposée contre lui à l'ONU en 1947, le grand mufti affirme que « les Allemands étaient suffisamment sans pitié et n'avaient eu besoin d'aucun encouragement pour exterminer les juifs » et que, pour sa part, opposé au projet de transférer les Juifs d'Europe de l'Est en Palestine, il s'était contenté d'écrire « à Ribbentrop, Himmler et Hitler jusqu'à ce qu['il] réussisse à faire échouer leurs efforts » en ce sens, estimant que la Pologne était une meilleure destination<ref>{{he}} [[Zvi Elpeleg]], ''Hamufti Hagadol'', éd. Misrad habitachon, 1989, {{p.|74-75}}.</ref>.
Dans ses mémoires parues en 1968, évoquant une plainte déposée contre lui à l'ONU en 1947, le grand mufti affirme que « les Allemands étaient suffisamment sans pitié et n'avaient eu besoin d'aucun encouragement pour exterminer les juifs » et que, pour sa part, opposé au projet de transférer les Juifs d'Europe de l'Est en Palestine, il s'était contenté d'écrire « à Ribbentrop, Himmler et Hitler jusqu'à ce qu['il] réussisse à faire échouer leurs efforts » en ce sens, estimant que la Pologne était une meilleure destination<ref>{{he}} [[Zvi Elpeleg]], ''Hamufti Hagadol'', éd. Misrad habitachon, 1989, {{p.|74-75}}.</ref>.

Version du 25 juin 2017 à 20:31

Mohammed Amin al-Husseini
Illustration.
Le mufti Husseini vers 1929.
Fonctions
Grand mufti de Jérusalem

(16 ans)
Prédécesseur Kamil al-Husayni
Successeur Hussam ad-Din Jarallah
Président du Conseil musulman suprême

(15 ans)
Biographie
Date de naissance Entre le et 1897
Lieu de naissance Jérusalem (Empire ottoman)
Date de décès (à 76-79 ans)
Lieu de décès Beyrouth (Liban)
Parti politique Haut Comité arabe
Profession Mufti
Religion Islam sunnite

Mohammed Amin al-Husseini (Jérusalem, (1313 AH)[1] - Beyrouth, 5 juillet[2] 1974), également connu en tant qu'Hadj Amin al-Husseini, ou encore en tant que grand mufti de Jérusalem est un chef religieux et nationaliste en Palestine mandataire.

Mohammed Amin al-Husseini est une figure particulièrement controversée du conflit israélo-palestinien. Sa collaboration avec les Nazis durant la Seconde Guerre mondiale et son antisémitisme pèsent lourdement dans son parcours. Dans sa lutte contre le nationalisme palestinien, la propagande israélienne a utilisé et amplifié cette image dans sa lutte contre le nationalisme palestinien et fait du Mufti une « icône du mal ».

Biographie

Jeunesse

Durant sa jeunesse, Amin a-Husseini est éduqué pour succéder à son père, mufti de Jérusalem[3]. Il étudie la loi islamique à l'université Al-Azhar du Caire puis il poursuit ses études dans une école d'administration à Istanbul[2].

En 1913[2], à 18 ans, il effectue le pèlerinage de la Mecque et rajoute Hadj à son nom[3] comme le permet la tradition musulmane[4] pour se faire appeler Hadj Amin al-Husseini, un des deux noms sous lesquels il est le plus souvent cité[5].

Durant la Première Guerre mondiale, il s'engage dans l'armée ottomane qu'il quitte[6] en 1917 pour retourner à Jérusalem[3]. Après la victoire britannique sur les Ottomans et leur arrivée en Palestine, il collabore avec ces derniers et devient « un musulman pieux, au service d'une armée chrétienne, contre un ennemi musulman »[7].

Activités politiques

Après la guerre, Amin al-Husseini devient membre d'Al-Nadi, une société secrète qui milite pour l'indépendance de la Syrie-Palestine[8]. À cette époque, les Français et les Arabes, dirigés par Fayçal ibn Hussein s'affrontent pour le contrôle de la Syrie et les Alliés ne se sont pas encore prononcés sur l'avenir du Moyen-Orient.

En 1919, dans le contexte de la visite de la commission King-Crane ayant la mission de recueillir l'avis des populations locales sur le mode de gouvernement qu'elles souhaitent, les dirigeants nationalistes Aref al-Aref et Amin al-Husseini parcourent les villes et villages palestiniens afin d'y organiser des manifestations pro-Hussein[9].

En 1920, il figure parmi les principaux instigateurs des émeutes de Nabi Moussa qui font une dizaine de morts et plus de 250 blessés[10] et dont le but est de faire pression sur les Alliés à la veille de la conférence de San Remo[11]. Son rôle lui vaut une condamnation à 10 ans d'emprisonnement par les Britanniques[10] mais il s'enfuit pour Damas avant son arrestation.

Le 8 juillet, en geste d'apaisement, le Haut-Commissaire Herbert Samuel, qui vient d'arriver en Palestine mandataire, le gracie, ainsi que les autres personnes condamnées lors des émeutes[12],[13].

À la même époque, les Français prennent le contrôle de la Syrie et chassent Fayçal de Damas. Le pan-arabisme de la révolte arabe de 1916-1918 est vaincu et un nationalisme arabe palestinien le remplace principalement au sein de l'élite dont Amin al-Husseini fait partie[14].

Par la suite, en tant que dirigeant arabe palestinien, Amin al-Husseini joue un rôle central dans l'opposition à l'immigration juive en Palestine et à la présence britannique. Celle-ci culmine avec l'insurrection arabe de 1936-1939 en Palestine qui fait plusieurs milliers de morts.

Mufti de Jérusalem

En mars 1921, Kamil al-Husseini, par ailleurs grand mufti et demi-frère d'Hadj Amin al-Husseini, meurt. Selon la loi, des élections sont organisées et le haut-commissaire britannique doit choisir parmi les trois premiers celui à qui le poste échoit. Amin al-Husseini termine quatrième. Néanmoins, Herbert Samuel, soucieux de maintenir un équilibre entre les al-Husaynis et le clan rival des Nashashibi (en)[15], décide de nommer Amin al-Husseini mufti de Jérusalem[16], un poste détenu par le clan al-Husseini depuis plus d'un siècle.

Amin al-Husseini restera mufti jusqu'en 1948, et à son remplacement par Husam al-Din Jarallah, nommé par le roi de Transjordanie, Abdallah Ier.

Soulèvements des années 1920-1930 et expulsion de Palestine

Après son retour en Palestine en 1921, al-Husseini continue ses activités politiques. Son rôle dans le massacre d'Hébron en 1929 est controversé. Le , à l'initiave d'al-Husseini, les chefs des clans arabes de Palestine forment le Haut comité arabe et lui en confient la présidence. En 1936, Al-Husseini est l'instigateur de la Grande Révolte arabe. Le , après le meurtre du commissaire britannique pour la Galilée, il est déchu par les Britanniques de sa position au sein du Haut conseil et de son poste de mufti, et doit fuir sur le territoire de l'État du Grand Liban. En octobre 1939, étant mis sous surveillance par les autorités françaises, il quitte le Liban pour le Royaume d'Irak[17].

Seconde Guerre mondiale

Rencontre avec Hitler en 1941.
Hadj Amin al-Husseini passant en revue une unité de la 13e division de montagne de la Waffen SS Handschar, composée en grande partie de musulmans de Bosnie (Silésie, novembre 1943).
Rachid Ali al-Gillani et Haj Amin al-Husseini lors d'un discours à Berlin.

En janvier 1941, il se réfugie en Allemagne et demande à Adolf Hitler la reconnaissance de l'indépendance des nations arabes vis-à-vis des puissances coloniales britannique et française, ainsi que celle du droit des autorités arabes palestiniennes à empêcher toute création de foyer juif[17].

Soutenant la prise du pouvoir par Rachid Ali al Gaylani en Irak, il prononce à la radio irakienne une fatwa appelant les musulmans au djihad contre le Royaume-Uni et reçoit des subsides allemands pour financer un projet de soulèvement en Palestine. Mais la victoire britannique dans la guerre anglo-irakienne le force à fuir sur le territoire de l'État impérial d'Iran. Après l'invasion anglo-soviétique de l'Iran, il est évacué en Italie. Le , il est reçu par Benito Mussolini, qui accepte le principe d'un soutien de l'Axe à sa proposition. Il se rend ensuite en Allemagne, où il est reçu par Hitler le [17].

Lors de sa rencontre avec Hitler et dans ses émissions de radio, Hadj Amin al-Husseini affirme que les Juifs sont les ennemis communs de l’islam et de l'Allemagne nazie[18]. Les notes sur cette rencontre sont prises par Paul-Otto Schmidt. Dans son compte-rendu, Schmidt rapporte les propos de Hitler au Mufti. Hitler lui expose certains projets stratégiques, notamment celui d’atteindre la porte sud du Caucase. Schmidt note alors : « Dès que cette percée sera faite, le Führer annoncera personnellement au monde arabe que l’heure de la libération a sonné. Après quoi, le seul objectif de l’Allemagne restant dans la région se limitera à l’extermination des Juifs vivant sous la protection britannique dans les pays arabes[19] ». Dans un télégramme daté du 2 novembre 1943 pour l'anniversaire de la Déclaration Balfour, Heinrich Himmler, lui offre ses « vœux chaleureux dans sa lutte continue contre les Juifs ». Himmler ajoutant que les Juifs du monde sont un « ennemi commun » et que pour cette raison, « il suit de près la bataille des Arabes recherchant la liberté, en particulier en Palestine, contre les envahisseurs juifs »[20].

Hitler fut impressionné par son sens de la ruse et sa prudence tactique[21]. Il dira de lui : « Le grand mufti est un homme qui en politique ne fait pas de sentiment. Cheveux blonds et yeux bleus, le visage émacié, il semble qu'il ait plus d'un ancêtre aryen. Il n'est pas impossible que le meilleur sang romain soit à l'origine de sa lignée »[22]. Il obtient le titre d'« aryen d'honneur » en 1941. Al-Husseini travaille ensuite à des émissions de radio de propagande, destinées aux mondes arabe et musulman[17]. En , il collabore aux recrutements de musulmans des Balkans pour former la 13e division de montagne de la Waffen SS Handschar[23]. Cependant la majorité des Arabes et des Palestiniens ne le suivront pas, selon Gilbert Achcar, « Les Arabes et les Berbères qui combattirent dans les rangs des Alliés durant la Seconde Guerre mondiale sont considérablement plus nombreux que ceux qui combattirent dans les rangs des pays de l'Axe[24] ». Ainsi, 9 000 Palestiniens combattirent dans les rangs de l'Armée britannique, des centaines de milliers de Maghrébins dans les troupes de la France libre et des centaines d'arabes furent déportés dans les camps nazis »[25],[26]. Robert Satloff (en) rappelle quant à lui que de nombreux Arabes d'Afrique du Nord aidèrent à sauver des Juifs et auraient pu mériter le titre de Juste[27].

Dans ses mémoires parues en 1968, évoquant une plainte déposée contre lui à l'ONU en 1947, le grand mufti affirme que « les Allemands étaient suffisamment sans pitié et n'avaient eu besoin d'aucun encouragement pour exterminer les juifs » et que, pour sa part, opposé au projet de transférer les Juifs d'Europe de l'Est en Palestine, il s'était contenté d'écrire « à Ribbentrop, Himmler et Hitler jusqu'à ce qu['il] réussisse à faire échouer leurs efforts » en ce sens, estimant que la Pologne était une meilleure destination[28].

Refuge en France et fuite en Égypte

À l'issue de la guerre, Amin al-Husseini fut recherché par les Britanniques en tant que collaborateur et par les Yougoslaves en tant que criminel de guerre. Il trouva refuge dans la région de Constance où il fut « arrêté » le par les troupes françaises. Le , il fut transféré dans la région parisienne où il fut hébergé avec ses deux secrétaires dans une villa de Saint-Maur et ce dans des conditions très favorables. À titre d’exemple, il recevait ses repas d’un restaurant voisin et, plus tard, un cuisinier fut mis à sa disposition par la mosquée de Paris. La maison était placée sous la surveillance de la police judiciaire de la préfecture de police mais c’était le Quai d’Orsay qui déterminait les conditions de détention du mufti et la politique à adopter à son égard. En , le mufti déménagea dans la villa « La Roseraie », à Bougival, puis il changea encore de lieu de résidence. Il pouvait recevoir librement ses invités, il était autorisé à se déplacer librement.

À plusieurs reprises, la France refusa de répondre aux demandes d’extradition de la Grande-Bretagne et de la Yougoslavie. En , les autorités françaises prirent la décision de permettre au mufti d’aller dans un pays arabe et la diplomatie française effectua des démarches diplomatiques auprès de ces pays afin qu’ils exigent la libération du mufti. Craignant en effet les réactions des États-Unis et de la communauté juive, la France voulait que cette libération apparaisse comme la conséquence des pressions irrésistibles des pays arabes, pressions auxquelles la Grande-Bretagne n’aurait pu d’ailleurs elle-même résister si elle avait été dans la même situation. Finalement, après avoir pu déjouer les surveillances, le mufti réussit à quitter la France le à 11 heures, en prenant un vol régulier de la compagnie américaine TWA d’Orly au Caire, muni d’un faux passeport fourni par le Quai d'Orsay et sous un nom d’emprunt[29].

Guerre israélo-arabe de 1948

Durant la guerre israélo-arabe de 1948, il mène, dans le camp arabe, le clan nationaliste palestinien, s'opposant à la fois à la fondation d'un État juif et aux ambitions du roi Abdallah Ier d'annexer une portion de la Palestine.

1948-1974

Après la défaite arabe contre Israël, le mufti prend la tête du « gouvernement de toute la Palestine ».

Il vit en Égypte jusqu'en 1960 quand il part vivre au Liban et il se retire de la vie publique en 1962 quand il démissionne de la présidence du Congrès islamique mondial[30]. Il était l'arrière-grand-oncle de Leila Shahid, une des dirigeantes de l'OLP.

Il reste un personnage d'influence. Ainsi selon Léon Poliakov, Amin al-Husseini a également joué un rôle pivot dans l'alignement de pays africains et asiatiques sur les positions antisionistes défendues par les pays arabes[31]. En effet, il a convaincu en la quasi-totalité des vingt-cinq participants à la conférence de Bandung[32] qui n'avaient jusqu'alors pas d'avis arrêté sur ces questions leur apparaissant comme très éloignées de leurs problèmes nationaux immédiats, au sortir de l'époque coloniale. Représentant le Yémen (où il n'avait jamais été) à la Conférence, Amin al-Husseini s'est efforcé de « révéler les véritables visées sionistes », à savoir « la constitution d'un vaste empire s'étendant du Nil à l'Euphrate — et incluant notamment la ville sainte islamique de Médine ». Certes, les autres orateurs arabes ont aussi prononcé des discours anti-israéliens à cette conférence, mais Amin al-Husseini a été le plus éloquent et il a convaincu son auditoire au point que, selon le compte rendu paru dans Le Monde du 20 avril 1955, « la résolution anti-israélienne a été le seul point d'accord de la conférence[33]».

Analyses

Responsabilités du mufti

Un certain nombre d’études émanant d’historiens ou de penseurs s'accordent sur la détermination du mufti dans sa lutte contre l'établissement des Juifs dans la région, sur son antisémitisme et l’importance du rôle qu’il joua à refuser tout accord entre Juifs et Arabes en Palestine. S'il y a débat sur la portée de son implication dans le processus d'extermination des Juifs, il ne fait néanmoins aucun doute qu'Husseini « a coopéré avec le régime le plus barbare des temps modernes », suivant l'un de ses biographes palestiniens[34].

Le conflit israélo-arabe

L'historiographie israélienne considère dès 1947 que le mufti de Jérusalem est responsable du conflit entre Arabes et Juifs en Palestine mandataire. La réédition d'une biographie du mufti écrite cette année-là par Moshe Pearlman (en), un proche de David Ben Gourion, est résumée par l'éditeur en ces mots :

« Par le passé, Arabes et Juifs vivaient pacifiquement en Palestine. Leurs dirigeants construisaient leur futur ensemble. Alors arriva Hadj Amin al-Husseini, l'oncle de Yasser Arafat. Il choisit le fascisme et le jihad. Les dirigeants modérés durent partir, intimidés et assassinés par lui. Ses projets sanglants furent temporairement interrompus par la Seconde Guerre mondiale, durant laquelle il partit pour l'Allemagne et où il collabora étroitement avec les dirigeants nazis dans des plans d'extermination et de bataille. Accusé de crime de guerre, il échappa aux Alliés pour poursuivre son travail de terreur, travail perpétué par ses proches et ses associés après sa mort[35]. »

Walter Laqueur rapporte des témoignages de l'époque qui vont dans le même sens. Ainsi, en 1938, le colonel Kisch écrit : « Je n'ai aucun doute, quoi qu'il en soit, que sans l'abus par le Mufti de ses immenses pouvoirs et la tolérance de ces abus par le gouvernement pendant 15 ans, une compréhension judéo-arabe dans le contexte du mandat aurait été atteinte depuis longtemps. » Cependant Laqueur nuance ce point de vue. Il écrit que : « [si le Mufti] assume beaucoup de responsabilité dans les émeutes de 1929 et la guerre civile de 1936-39 [;] […] il est naïvement optimiste de supposer que sans la nomination du Mufti et ses activités, les relations judéo-arabes auraient suivi un chemin différent [car] tôt ou tard l'élément extrémiste aurait prévalu parmi les autorités arabes[36]. »

L'antisémitisme

L'historiographie israélienne insiste sur l'antisémitisme du mufti[37] et l'importance de son rôle dans la collaboration avec le régime nazi pour l'extermination des Juifs, aspect le plus connu en Occident, ainsi qu'en Israël[38].

Dans son livre « Eichmann à Jérusalem », Hannah Arendt écrit : « Les connexions du Grand Mufti avec les nazis durant la guerre n’étaient pas secrètes ; il avait l’espoir qu’elles l’aideraient à exécuter une sorte de solution finale au Proche-Orient »[39].

Selon Benny Morris, « le Mufti était profondément antisémite. » Il justifie ce point de vue en soulignant que le mufti colportait l'idée que les Juifs avaient provoqué leur propre Holocauste et qu'ils étaient « suffisants [et] enracinés dans leur croyance d'être le peuple élu […] ». Dans le contexte de sa thèse selon laquelle la guerre de 1948 était perçue par les Arabes comme un Jihad, il souligne que le mufti faisait référence au Coran dans ses attaques contre les Juifs[40].

Ce point de vue est également partagé par d'autres chercheurs. Ainsi, dans une étude portant sur les possibilités de voir la solution finale s'établir en Palestine, une équipe d'historiens de l'université de Stuttgart écrit que « Le Grand Mufti de Jérusalem, Hadj Amin al-Husseini, était le plus grand collaborateur des nazis dans le camp arabe et un antisémite sans compromis »[41],[42]

Husseini intervient le auprès du ministère des Affaires étrangères allemand pour bloquer le transfert vers la Palestine des Juifs de Bulgarie, Hongrie et Roumanie après qu'on lui a transmis des rapports (erronés) selon lesquels 4 000 enfants juifs et 500 adultes ont réussi à atteindre la Palestine. Il insiste auprès du ministre pour qu'il fasse la maximum pour bloquer de telles propositions dans le futur[43].

Certaines de ses biographies soulignent davantage son nationalisme[44]. Zvi Elpeleg, auteur d'une étude biographique intitulée The Grand Mufti: Haj Amin Al-Hussaini, Founder of the Palestinian National Movement, conclut son chapitre portant sur le rôle du Mufti dans l'extermination des Juifs en écrivant qu'« en tous les cas, il n'y a aucun doute que la haine du Mufti n'était pas limitée au sionisme mais s'étendait aux Juifs en tant que tels. Ses contacts fréquents et étroits avec les dirigeants du régime nazi ne peuvent lui avoir laissé aucun doute sur le destin qui attendait les Juifs dont l'émigration était empêchée par ses efforts. Ses nombreux commentaires montrent qu'il n'était pas seulement réjoui que les Juifs étaient empêchés d'émigrer en Palestine, mais qu'il était très satisfait par la Solution Finale des nazis[45] ».

Le délégué d'Eichmann Dieter Wisliceny rapporte en 1946 d'une part que le Grand Mufti avait été informé de la solution finale de la question juive par Adolf Eichmann fin 1941 et que d'autre part le Grand Mufti aurait lui-même à plusieurs reprises suggéré aux dirigeants nazis notamment Hitler, Ribbentrop et Heinrich Himmler d'exterminer le peuple Juif, considérant que ceci constituait la meilleure solution pour résoudre le problème palestinien[46].

L'historiographie officielle israélienne critiquée

Pour le politologue franco-libanais Gilbert Achcar, le mufti de Jérusalem a occupé une place centrale dans la propagande israélienne visant à « dénoncer [un] antisémitisme congénital [chez les] Arabes » et à « impliquer les Palestiniens et les Arabes dans le génocide nazi »[47],[48]. Il rappelle cependant que le Mufti, fondateur des Frères Musulmans en Palestine, n'eut qu'une influence très limitée dans le monde arabe en rappelant notamment que seulement 6 300 Arabes rejoignirent différentes organisations militaires nazies tandis que 259 000 rejoignirent les Alliés, dont 9 000 Palestiniens[49]. Sur ce point particulier, les affirmations de Gilbert Achcar ont été vigoureusement contestées par l'historien américain Jeffrey Herf, qui relève notamment que selon une étude effectuée en 1941 60% des Palestiniens étaient en faveur des nazis - ce qu'Achcar lui-même reconnaît dans son livre - et note en outre la grande influence qu'eurent les idées du mufti sur l'OLP[50].

Dans un ouvrage consacré au rôle et à l'usage de l'Holocauste dans le sentiment nationaliste israélien, l'historienne Idith Zertal considère qu'« une description plus correcte [le ferait apparaître] comme un dirigeant palestinien nationaliste-religieux fanatique […][51][source insuffisante] ». Au terme d'une étude de l'utilisation de son image lors du procès Eichmann en 1961, elle conclut que « l'amplification de l'image du Mufti et de son rôle dans l'extermination des Juifs d'Europe ne se limite pas aux actes à visées éducatives et politiques du procès Eichmann. Elle s'est également diffusée dans l'historiographie de référence sur l'Holocauste. » Reprenant un constat de Peter Novick (en)[52], elle souligne à cet égard à propos de l'Encyclopédie de l'Holocauste (en), projet international de Yad Vashem, « le fait étonnant que le Mufti a été dépeint par les auteurs de l'Encyclopédie comme l'un des grands concepteurs et auteurs de la Solution finale : l'article qui lui est consacré est deux fois plus long que ceux de Goebbels et Goering, plus long que la somme des articles consacrés à Heydrich et Himmler et plus long que celui d'Eichmann ». Elle ajoute que, dans la version hébraïque, son article est presque aussi long que celui d'Adolf Hitler[53].

L’historien israélien Tom Segev explique que le mur qui lui est consacré à Yad Vashem cherche à tort à donner l’impression d’une convergence entre le projet génocidaire antisémite du nazisme et l’hostilité arabe à Israël[54].

Instrumentalisation politique

En octobre 2015, en s'adressant au congrès sioniste à Jérusalem le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou soutient que « Hitler ne voulait pas exterminer les Juifs à l'époque, il voulait seulement les expulser », mais que c'est le Mufti qui l'aurait persuadé de les exterminer car il ne voulait pas les voir arriver en Palestine[55].

Cette prise de position entraîne immédiatement de vives critiques. Du côté israélien le chef de l'opposition travailliste Isaac Herzog déclare sur sa page Facebook « il s'agit d'une distorsion historique dangereuse. Je demande à Netanyahu de corriger directement ses déclarations qui minimisent l'Holocauste, le nazisme et... le rôle d'Hitler dans la terrible catastrophe de notre peuple[56] ». Dans une tribune publiée sur I24news, l'historien Élie Barnavi évoque pour sa part une « prostitution de la Shoah » et estime que Netanyahou « foule aux pieds le Saint des Saints de la mémoire douloureuse du peuple juif » et « offre un cadeau inespéré aux négationnistes de tout poil[57] ». Du côté palestinien, Saeb Erekat déclare que c'est « un jour triste que celui où le chef du gouvernement israélien en vient à tellement haïr ses voisins qu'il est prêt à absoudre le pire criminel de guerre de l'histoire, Adolf Hitler, du meurtre de six millions de juifs au cours de la Shoah. M. Netanyahu devrait cesser d'utiliser cette tragédie humaine pour essayer de faire avancer son agenda politique[58] ».

Face à cette polémique, Netanyahou assure qu’il n’a pas eu l’intention « d’absoudre Hitler de sa responsabilité », mais de souligner les intentions génocidaires contre les Juifs du premier leader du nationalisme palestinien[59].

Notes et références

  1. Philip Mattar fait état d'une controverse quant à la date de naissance d'Husseini qui a longtemps été présenté comme étant né en 1893.
  2. a b et c Biographie d'Amin al-Husseini sur le site passia.org
  3. a b et c Tom Segev (2000), p. 103.
  4. Voir l'article Hadj.
  5. On parle de lui en tant « qu'Hadj Amin al-Husseini », « le mufti » ou « le grand mufti », en précisant parfois « de Jérusalem ». Attention néanmoins qu'il ne devint mufti qu'à partir de 1921, poste auquel il succéda à son frère.
  6. Benny Morris, Victimes, p.117, parle de désertion pour rejoindre l'armée de Hussein; c'est aussi le cas de sa biographie sur passia.org mais qui fixe cet événement à 1916. Tom Segev, One Palestine, complete, p. 103 fait référence à une démobilisation pour cause de maladie.
  7. Tom Segev (2000), p. 103 indique qu'il aurait ainsi permit le recrutement d'au moins 2 000 Arabes pour les Britanniques.
  8. Benny Morris (2003), p. 49.
  9. Howard Sachar, A History of Israel from the Rise of Zionism to our Time, Knopf, 3e édition, 2007, p. 166.
  10. a et b Tom Segev (2000), p. 138-139.
  11. Howard Sachar, A History of Israel from the Rise of Zionism to our Time, Knopf, 3e édition, 2007, p. 123.
  12. Benny Morris (2003), p. 111.
  13. Moshe Perlman, Mufti of Jerusalem, 2006, p. 16 écrit qu'en réalité il n'est pas gracié à ce moment mais plus tard en septembre, à la suite d'une visite en Transjordanie et que cela indique la gravité de l'implication d'al-Husseini; Tom Segev (2000), p. 156 situe également l'amnistie dans le contexte de la visite en Transjordanie d'Herbert Samuel.
  14. Benny Morris (2003), pp.47-50.
  15. Benny Morris, Righteous Victims, p. 111ff.
  16. Howard M. Sachar, 2006, A History of Israel: From the Rise of Zionism to Our Time, New York, Alfred A. Knopf, seconde édition (ISBN 0679765638), p. 170.
  17. a b c et d HAJJ AMIN AL-HUSAYNI: TIMELINE
  18. Gérald Fleming, Hitler and the Final Solution, Berkeley, 1984, p. 101-105. Ce chapitre décrit la visite de l'ex-Mufti à Hitler, le 28 novembre 1941, et contient le protocole de leur discussion.
  19. Notes prises par Paul Otto Schmidt entre le Führer et le mufti de Jérusalem à Berlin, le 28 novembre 1941, geheime Reichssache 57 a/41, Records Dept. Foreign and Commonwealth Office Pa/2, cité par Laurens, L'Orient arabe, arabisme et islamisme de 1798 à 1945, Paris, Armand Colin, 1993, p. 342-346, et par Gerald Fleming, Hitler et la solution finale, Julliard, 1988, p. 142-143.
  20. « Nazi SS Commander Wished Islamic Leader Success In Fight ‘Against The Jewish Invaders », sur The Daily Caller,
  21. « Au cours des discussions il s'est révélé être un fin renard ; en vue de gagner du temps pour réfléchir, il se fait traduire certaines choses non seulement en français mais aussi en arabe, et il pousse la prudence jusqu'à s'en faire écrire d'autres. Quand il parle, il soupèse chacun de ses mots. Dans l'astuce, il égale presque les Japonais », Hugh Trevor-Roper, Gerhard Weinberg, Norman Cameron (trad.), R. H. Stevens (trad.), Hitler's Table Talk 1941-1944: His Private Conversations, Enigma Books, 2008, 609 p. (ISBN 978-1929631667), p. 412.
  22. Hugh Trevor-Roper, Gerhard Weinberg, Norman Cameron (trad.), R. H. Stevens (trad.), Hitler's Table Talk 1941-1944: His Private Conversations, op. cit., p. 412.
  23. Léon Poliakov, De Moscou à Beyrouth : essai sur la désinformation, Paris, Calmann-Lévy, 1983 (ISBN 2-7021-1240-4), p. 54.
  24. Gilbert Achcar, Les Arabes et la Shoah, Arles, Actes Sud, coll. « Sindbad », 2009 présentation en ligne.
  25. Alain Gresh, De quoi la Palestine est-elle le nom – Les Liens qui Libèrent, Floch, septembre 2010.
  26. Gilbert Achcar, The Arabs and the Holocaust: The Arab-Israeli War of Narratives, Henry Holt and Company, 2009, p.146.
  27. (en) Robert Satloff, Among the Righteous. Lost Stories from the Holocaust's Long Reach into Arab Lands, New York, Public Affairs, 2006.
  28. (he) Zvi Elpeleg, Hamufti Hagadol, éd. Misrad habitachon, 1989, p. 74-75.
  29. Tsilla Hershco, Le grand mufti de Jérusalem en France : Histoire d'une évasion, Revue Controverses, no 1, mars 2006.
  30. site www.encyclopedia.com.
  31. Léon Poliakov, De Moscou à Beyrouth : essai sur la désinformation, op. cit., p. 53-55.
  32. Seule la Birmanie a maintenu son amitié pour Israël encore longtemps après.
  33. Cité par Léon Poliakov, De Moscou à Beyrouth : essai sur la désinformation, op. cit., p. 54.
  34. Philip Mattar, The Mufti of Jerusalem, éd. Columbia University Press, 1992, p. 99 ; cité par Benny Morris, Victimes : histoire revisitée du conflit arabo-sioniste, éd. Complexe, 2003, p. 186, extrait en ligne.
  35. Moshe Perlman, Mufti of Jerusalem : Haj Amin el Husseini, A Father of Jihad, Pavilion Press, 2006, page de couverture.
  36. Walter Laqueur, A History of Zionism, Schocken Books, 1976, p. 244-245, se référant à F. Kisch, Palestine Diary, Londres, 1938, p. 19.
  37. Voir Joseph Schetchman et Moshe Perlman dans la bibliographie et http://www.jcpa.org/phas/phas-kuntzel-s05.htm
  38. Voir David G. Dalin dans la bibliographie.
  39. Traduction libre de Eichmann in Jerusalem, Hannah Arendt, p. 13 [1].
  40. Benny Morris, 1948, 2008, p. 21-22.
  41. Article publié le 13 avril 2006 dans le Washington Times
  42. Étude de Matthias Küntzel publiée dans Jewish Political Studies Review (17:1-2, Spring 2005) [2].
  43. Raul Hilberg (trad. André Charpentier, Pierre-Emmanuel Dauzat, Marie-France de Paloméra), La Destruction des Juifs d'Europe, t. II, Paris, Éditions Gallimard, coll. « Folio Histoire », édition définitive 2006, 884 p. (ISBN 978-2-07-030984-9), chap. VIII (« Les déportations »), p. 1470-1471 (pages numérotées de 710 à 1593).
  44. Eric Rouleau (1994).
  45. Zvi Elpeleg (1993), p. 73.
  46. David Patterson A genealogy of Evil, anti-semitism from nazism to islamic jihad Cambridge University Press 2011 p. 116 (ISBN 978-0-521-13261-9)
  47. Inusable grand mufti de Jérusalem
  48. Les Arabes et la Shoah. La guerre israélo-arabe des récits, Gilbert Achcar, Sinbad, Actes Sud, 2009, p. 260-273
  49. Les Arabes et la Shoah. La guerre israélo-arabe des récits, Gilbert Achcar, Sinbad, Actes Sud, 2009, p. 231-234
  50. « Not in Moderation », The New Republic, 1er novembre 2010
  51. Idith Zertal, Israel's Holocaust and the Politics of Nationhood, Cambridge University Press, 2005.
  52. Voir, selon la référence donnée par Idith Zertal, Peter Novick, The Holocaust in American Life, New-York, 1999, p. 158.
  53. Idith Zertal, Israel's Holocaust and the Politics of Nationhood, Cambridge University Press, 2005, p. 103.
  54. Le Septième Million. Les Israéliens et le génocide, Paris, Liana Levi, 2002
  55. Netanyahu: Hitler Didn't Want to Exterminate the Jews, Haaretz, 21 octobre 2015
  56. "Hitler ne voulait pas exterminer les Juifs", Le Vif, 21 octobre 2015
  57. Les nouveaux nazis de Netanyahou, Elie Barnavi, I24news, 21 octobre 2015
  58. Opposition Blasts Netanyahu for 'Distorting' Holocaust History, Barak Ravid et Jonahtan Lis, Haaretz, 21 octobre 2015
  59. Centre Wiesenthal : « Le Grand Mufti de Jérusalem, un personnage clé de la Solution finale.

Annexes

Documentation

Ouvrages utilisés dans la rédaction de l'article

Historiographie récente

Historiographie palestinienne

  • (en) Tatsur Jbara, Palestinian Leader, Hajj Amin Al-Husoyni, Mufti of Jerusalem, Kingston Press, 1985, (ISBN 0-940670-21-6).

Historiographie israélienne traditionnelle

  • (en) Moshe P. Waters, Mufti over the Middle East. An account of the career of Amin el Husseini, Londres, Barber, 1942.
  • (en) The Arab Higher Committee: its Origins, Personnel and Purposes. The Documentary Record, New York, Nations Associates Inc., 1947. Traduction française : Le Haut Comité arabe, ses origines, ses membres, ses buts. Documents d'archives soumis aux Nations Unies en mai 1947, Paris, 1948.
  • (de) Simon Wiesenthal, Grossmufti grossagent der Achse, 1947.
  • (en) Moshe Perlman, Mufti of Jerusalem: The Story of Haj Amin el Husseini, V Gollancz, Londres, 1947 republié sous le titre Mufti of Jerusalem: Had Amin el Husseini, A Father of Jihad, Pavilion Press, 2006, (ISBN 1-4145-0698-8).
  • (en) Joseph Schechtman, The Mufti and the Fuehrer: the rise and fall of Haj Amin el-Husseini, Yoseloff, 1965.
  • Menachem Arnoni, Le Nationalisme arabe et les nazis, Tel-Aviv, Mouvement ouvrier sioniste mondial, 1970 (1re édition, en hébreu, en 1968).
  • Union Internationale de la Résistance et de la Déportation (U.I.R.D), Comme au temps de Hitler, 1970.

Filmographie

Témoignages

  • André-Paul Weber, Conseiller du Grand Mufti, l'Odyssée du docteur Pierre Schrumpf-Pierron 1882-1952, Éditions Hirlé, 2005.

Romans

Articles

Articles connexes

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