Aller au contenu

Ella Baker

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ella Josephine Baker
Description de cette image, également commentée ci-après
Ella Baker en 1944.
Naissance
Norfolk, Virginie, États-Unis
Décès (à 83 ans)
New York
Nationalité Américaine
Diplôme
Major de promotion 1927, Shaw University
Activité principale
Militante pour les droits civiques
Famille
Mariée à T.J. (Bob) Roberts, divorcée en 1958

Ella Josephine Baker, née le et morte le , est une journaliste, directrice de la publication, militante afro-américaine, figure majeure de la National Association for the Advancement of Colored People, du Student Nonviolent Coordinating Committee et plus généralement du mouvement américain des droits civiques.

Jeunesse et formation

[modifier | modifier le code]

Ella Baker est née en 1903 à Norfolk, en Virginie. Elle est le second enfant de Blake Baker, un serveur sur le ferry qui joint Norfolk à Washington (district de Columbia), et de son épouse Georgianna Ross, qui a exercé la profession d'enseignante d'école primaire jusqu'à son mariage. Elle a une sœur cadette, Margaret, et un frère aîné, Curtis[1],[2],[3],[4],[5].

Une famille religieuse

[modifier | modifier le code]

Alors que Ella Baker est âgée de huit ans, sa mère, Georgianna Baker, fuit le climat humide de Norfolk pour emménager à Littleton, dans l'État de Caroline du Nord. Les lois Jim Crow sévissent aussi bien à Norfolk qu'à Littleton. Comme dans tous les États du Sud, les règles de la ségrégation issues des lois Jim Crow sont omniprésentes, notamment par les panneaux désignant les lieux réservés aux Blancs et à ceux réservés aux Noirs ou aux « Colored »[4].

C'est dans ce climat de racisme que Ella Baker suit ses études primaires à Littleton, dans l'État de Caroline du Nord. Village où son grand-père maternel Mitchell Ross, un esclave émancipé après la guerre de Sécession, y possède un terrain agricole, où il pratique l'élevage de bovins et le maraîchage ; il est également le pasteur baptiste de Littleton. De cette période, Ella Baker retient des sermons de son grand père que la relation aux êtres humains est bien plus importante que la relation à l'argent et plus généralement aux biens matériels, mais c'est également durant cette période qu'elle est appelée nigger (« négresse ») par un enfant blanc, or nigger est la pire des insultes que l'on peut adresser à un Afro-Américain[2],[3],[6].

Ella Baker est également marquée par l'exemple de sa mère Georgianna Baker quant à son attention aux des nécessiteux[2].

Après avoir achevé ses études secondaires, Ella Baker est acceptée par l'université Shaw de Raleigh, où elle obtient le Bachelor of Arts en 1927.

La grande Dépression

[modifier | modifier le code]
Photographie de George S. Schuyler prise par Carl Van Vechten.

Une fois diplômée, Ella Baker part pour New York tout en caressant le rêve de se rendre à Chicago pour suivre des cours de sociologie à l'université. En attendant, elle écrit des articles pour divers quotidiens, dont l'American West Indian News, dont elle devient membre de la direction de la publication. C'est en 1929, année de la grande Dépression, époque où les temps sont durs et plus particulièrement pour les Afro-Américains ; pour s'en sortir, Ella Baker occupe divers emplois alimentaires[2].

En 1932, elle rencontre George Schuyler, avec qui elle fonde la Young Negro Cooperative League et écrit des articles dans les colonnes du magazine The Nation[2],[3].

Pendant la période du New Deal, Ella Baker travaille au sein de la Work Projects Administration, jusqu'en 1938[2],[3].

En 1940 ou 1941[note 1], Ella Baker épouse Thomas J. Roberts, qu'elle connaît depuis 1927 ; le couple s'installe dans un appartement proche de la Saint Nicholas Avenue, dans le quartier de Harlem. Le couple n'aura pas d'enfant. Ella Baker, pour affirmer son indépendance, garde son nom de naissance, geste peu fréquent à cette époque. Ella Baker parle peu de son mariage, ses proches, persuadés qu'elle est célibataire, continuent de l'appeler « miss Baker » ; ce silence fait que les biographes ne peuvent documenter sa vie conjugale[2],[7].

La National Association for the Advancement of Colored People

[modifier | modifier le code]
L'assistante de terrain
[modifier | modifier le code]
Photographie de Harry Tyson Moore.

En 1938, Ella Baker quitte la Work Projects Administration pour entrer à la National Association for the Advancement of Colored People, organisation qui se bat contre la pratique des lynchages, où elle embauchée comme assistante de terrain et cela pour un salaire de 29 $[note 2] la semaine. Ella Baker se réjouit d'être payée pour critiquer et combattre le système. Elle est envoyée pour rendre visite aux sections locales des États du sud pour encourager leurs actions, les aider à trouver des fonds et recruter de nouveaux adhérents. Cette tournée lui fait traverser des États comme ceux de l’Alabama, de la Floride, de la Géorgie, de la Virginie, où règnent les lois Jim Crow et des groupes terroristes affiliés au Ku Klux Klan, États où les Blancs ont la haine de la NAACP et de ses représentants. En Floride, elle bénéficie du soutien de Harry Tyson Moore. Durant cette tournée, Ella Baker se rend compte que les salariés afro-américains qui ont le plus besoin de l'appui de la NAACP, comme les portiers, domestiques, employés de la voirie, chauffeurs, ouvriers du bâtiment, jardiniers sont les plus dépendants des Blancs, qui sont leurs principaux employeurs et que la NAACP doit prendre compte ce fait quant au recrutement et la formation des nouveaux membres. Ella Baker est d'autant plus consciente de la situation qu'elle-même vient du Sud[2],[8],[9].

La directrice des sections locales
[modifier | modifier le code]

Au bout de six ans, Ella Baker est promue au poste de directrice des sections locales. C'est la première fois qu'une femme accède à cette situation. Cette position lui permet de recruter des membres, récolter des fonds et d'organiser des campagnes locales. Elle se déplace dans le sud profond, là où sévissent les lois Jim Crow, les pires formes de ségrégation, les lynchages perpétrés par le Ku Klux Klan et autres adeptes du suprémacisme blanc, afin d'aider les adhérents et les Afro-Américains à y faire face. Lors d'une de ses conférences est présente Rosa Parks qui lancera une campagne de boycott contre la compagnie des bus de Montgomery [2],[3],[8],[10].

La démission
[modifier | modifier le code]
Portrait de Ralph Bunche.

Lors de ses déplacements, Ella Baker rencontre d'autres personnalités de la NAACP comme Edward Franklin Frazier, Ralph Bunche et Abram Lincoln Harris. C'est également un moment où la NAACP subit un conflit entre deux personnalités dirigeantes, W. E. B. Du Bois et Walter White, ce dernier reprochant à W. E. B. Du Bois d'utiliser son magazine The Crisis pour imposer ses vues sur la NAACP. Le conflit s'achève en 1948, lorsque Walter White est parvenu à chasser W. E. B. Du Bois de l'organisation. Ella Baker partage de nombreux points de vue de W. E. B. Du Bois ; lassée par la guerre des égos, elle quitte la NAACP en 1946[2],[11].

La Southern Christian Leadership Conference

[modifier | modifier le code]

Elle devient directrice adjointe de la Southern Christian Leadership Conference en 1958, puis directrice générale jusqu'en 1960[2].

Elle est devenue l’une des figures marquantes du mouvement pour les droits civils des années 1950-1960, elle a travaillé aux côtés des grandes personnalités représentatives du mouvement, comme W. E. B. Du Bois, Thurgood Marshall, Marvel Cooke, Asa Philip Randolph, Bayard Rustin, Martin Luther King, etc[2].

Le Student Nonviolent Coordinating Committee

[modifier | modifier le code]

En 1960, des sit-ins sont organisés par des étudiants et étudiantes dans plus de 30 localités, et Ella Baker propose de créer une organisation pour structurer le travail militant, ce qui donne naissance au Student Nonviolent Coordinating Committee à l'Université Shaw en 1960[2].

Elle meurt le , jour de son 83e anniversaire, dans sa résidence de New York, ses funérailles sont célébrées à l'église baptiste abyssinienne de Harlem[12].

Les archives d'Ella Baker sont consultables et disponibles au Schomburg Center for Research de la New York Public Library[13].

Dans la culture populaire

[modifier | modifier le code]
  • Un film est tourné en 1981, sous la direction de Joanne Grant, Fundi: The Story of Ella Baker[16].

Notes et références

[modifier | modifier le code]
  1. Les différentes notices encyclopédiques et biographies consultées ne donnent pas de date précise quant au mariage d'Ella Baker
  2. Soit l'équivalent de la somme de 650 $ en 2024  [lire en ligne]

Références

[modifier | modifier le code]
  1. (en-US) « Ella Baker | American activist », sur Encyclopedia Britannica (consulté le )
  2. a b c d e f g h i j k l et m (en-US) John A. Garraty (dir.), Mark C. Carnes (dir.) et Susan Gushee O'Malley (rédactrice), American National Biography, vol. 2 : Baker - Blatch, New York, Oxford University Press, USA, , 959 p. (ISBN 9780195127812, lire en ligne), p. 8-10
  3. a b c d et e (en-US) Anne Commire (dir.), Deborah Klezmer (dir.) et Michael D. Cary, Women in World History, vol. 2 : Ba-Brec, Waterford, Connecticut, Yorkin Publications / Gale Group,, , 920 p. (ISBN 9780787640613, LCCN 99024692, lire en ligne), p. 68-74
  4. a et b (en-US) Shyrlee Dallard (préf. Andrew Young), Ella Baker : A Leader Behind the Scenes, Englewood Cliffs, New Jersey, Silver Burdett Press, , 140 p. (ISBN 9780382099311, LCCN 90031932, lire en ligne), p. 8-9
  5. (en-US) Barbara Ransby, Ella Baker and the Black Freedom Movement : A Radical Democratic Vision, Chapel Hill, Caroline du Nord, University of North Carolina Press (réimpr. 2005) (1re éd. 2003), 500 p. (ISBN 9780807856161, LCCN 2002153275, lire en ligne), p. 14-15
  6. Dallard, Ella Baker (lire en ligne), p. 10
  7. Ransby, Ella Baker and the Black freedom movement (lire en ligne), p. 101-102
  8. a et b Dallard, Ella Baker (lire en ligne), p. 39-46
  9. Ransby, Ella Baker and the Black freedom movement (lire en ligne), p. 104-105
  10. Ransby, Ella Baker and the Black freedom movement (lire en ligne), p. 106-107
  11. Ransby, Ella Baker and the Black freedom movement (lire en ligne), p. 108-130
  12. Gerald Fraser, « Ella Baker, Organizer for Groups in Civil-Rights Movement in South », The New York Times,‎ , Section B, Page 18 (lire en ligne Accès payant)
  13. (en-US) « Ella Baker Papers » Accès libre, sur Schomburg Center for Research in Black Culture
  14. (en-US) « Baker, Ella », sur National Women’s Hall of Fame (consulté le )
  15. (en-US) Faith Ringgold, « The Sunflower Quilting Bee at Arles », sur Philadelphia Museum of Art
  16. (en-US) « Fundi: The Story of Ella Baker », sur IMDb

Pour approfondir

[modifier | modifier le code]

Bibliographie

[modifier | modifier le code]

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

Notices dans des encyclopédies ou des livres de références

[modifier | modifier le code]
  • (en-US) Ellen Cantarow (dir.) et Susan Gushee O'Malley (rédactrice), Moving the mountain : Women working for social change, Old Westbury, état de New York, Feminist Press, coll. « Women's lives, women's work » (réimpr. 1993, 2004) (1re éd. 1980), 166 p. (LCCN 79011840, lire en ligne), p. 52-93,
  • (en-US) G. J. Barker-Benfield et Catherine Clinton, Portraits of American Women : From Settlement to the Present, New York, Oxford University Press, USA (réimpr. 1998, 2023) (1re éd. 1991), 604 p. (LCCN 97040361, lire en ligne), p. 560-577,
  • (en-US) Barbara C. Bigelow (dir.) et Liza Featherstone (rédactrice), Contemporary Black Biography, vol. 5, Detroit, Michigan, Gale Research Inc., , 327 p. (ISBN 9780810385573, lire en ligne), p. 9-12,
  • (en-US) Peggy Saari (dir.), Prominent Women of the 20th Century, vol. 1 : A-C, New York, U.X.L, , 274 p. (ISBN 9780787606466, LCCN 95041363, lire en ligne), p. 91-95,
  • (en-US) Amy Alexander, Amy Alexander, Secaucus, New Jersey, Carol Pub. Group (réimpr. 2001, 2003) (1re éd. 1998), 306 p. (LCCN 98025237, lire en ligne), p. 82-84,
  • (en-US) John A. Garraty (dir.), Mark C. Carnes (dir.) et Susan Gushee O'Malley (rédactrice), American National Biography, vol. 2 : Baker - Blatch, New York, Oxford University Press, USA, , 959 p. (ISBN 9780195127812, lire en ligne), p. 8-10. Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article,
  • (en-US) Anne Commire (dir.), Deborah Klezmer (dir.) et Michael D. Cary (rédacteur), Women in World History, vol. 2 : Ba-Brec, Waterford, Connecticut, Yorkin Publications / Gale Group, , 920 p. (ISBN 9780787640613, LCCN 99024692, lire en ligne), p. 68-74. Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article,
  • (en-US) Dorothee E. Kocks, Dream a Little : Land and Social Justice in Modern America, Berkeley, Californie, University of California Press, , 261 p. (ISBN 9780520202863, LCCN 99056435, lire en ligne), p. 157-192,
  • (en-US) Rosetta E. Ross (dir.), Witnessing and Testifying : Black Women, Religion, and Civil Rights, Minneapolis, Minnesota, Fortress Press, , 299 p. (ISBN 9780800636036, LCCN 2002155091, lire en ligne), p. 32-51,
  • (en-US) Paul Finkelman, Encyclopedia of African American History, 1896 to the Present : From the Age of Segregation to the Twenty-first Century, vol. 1 : A-C, New York, Oxford University Press (réimpr. 2009) (1re éd. 2006), 533 p. (ISBN 9780195167795, LCCN 2008034263, lire en ligne), p. 115-118,
  • (en-US) Henry Louis Gates (dir.) et William Lightfoot (rédacteur), The African American National Biography, vol. 1 : Aaron - Brown, Ruth, New York, Oxford University Press, USA (réimpr. 2012) (1re éd. 2008), 577 p. (ISBN 9780199920785, LCCN 2011043281, lire en ligne), p. 302-304,
  • (en-US) Cath Senker, Stories of Women in the 1960s : Fighting for Freedom, Chicago, Illinois, Heinemann Raintree, coll. « Women's Stories from History », , 120 p. (ISBN 9781484608661, LCCN 2014015528, lire en ligne), p. 30-54,

Essais et biographies

[modifier | modifier le code]
  • (en-US) Shyrlee Dallard (préf. Andrew Young), Ella Baker : A Leader Behind the Scenes, Englewood Cliffs, New Jersey, Silver Burdett Press, , 140 p. (ISBN 9780382099311, LCCN 90031932, lire en ligne). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article,
  • (en-US) Joanne Grant (préf. Julian Bond), Ella Baker : Freedom bound, New York, John Wiley & Sons, , 288 p. (ISBN 9780471020202, LCCN 97033034, lire en ligne).
  • (en-US) Barbara Ransby, Ella Baker and the Black Freedom Movement : A Radical Democratic Vision, Chapel Hill, Caroline du Nord, University of North Carolina Press (réimpr. 2005) (1re éd. 2003), 500 p. (ISBN 9780807856161, LCCN 2002153275, lire en ligne). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article.
  • (en-US) J. Todd Moye, Ella Baker : Community Organizer of the Civil Rights Movement, Lanham, Maryland, Rowman & Littlefield Publishers, Inc. (réimpr. 2015) (1re éd. 2013), 208 p. (LCCN 2013018707, lire en ligne)

Articles anglophones

[modifier | modifier le code]
  • Gerald Fraser, « Ella Baker, Organizer for Groups in Civil-Rights Movement in South », The New York Times,‎ , Section B, Page 18 (lire en ligne Accès payant). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Charles Payne, « Ella Baker and Models of Social Change », Signs, vol. 14, no 4,‎ , p. 885-899 (15 pages) (lire en ligne Inscription nécessaire),
  • Joy James, « Ella Baker, 'Black Women's Work' and Activist Intellectuals », The Black Scholar, vol. 24, no 4,‎ , p. 8-15 (8 pages) (lire en ligne Inscription nécessaire),
  • Aprele Elliott, « Ella Baker: Free Agent in the Civil Rights Movement », Journal of Black Studies, vol. 26, no 5,‎ , p. 593-603 (11 pages) (lire en ligne Inscription nécessaire),

Liens externes

[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :